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Procès du putsch de 2015: des médiateurs cités à comparaître


L’audience du procès du coup d’Etat manqué de septembre 2015 s’est poursuivi ce mardi 27 mars 2018, avec l’examen des listes des différents témoins. Si 29 des 42 témoins du parquet ont répondu «présents», 22 des 25 du Général de brigade Gilbert Diendéré sont «non comparants», parce que n’ayant pas les citations. La surprise est venue du Général Djibrill Bassole. Son conseil souhaite faire citer les présidents Macky Sall, Yayi Boni, Mahamadou Issoufou et le président du tribunal, Seydou Ouédraogo.
Le président du tribunal, Seydou Ouédraogo, attend toujours, au 5e jour des audiences, les notifications de la Cour de cassation, sur les requêtes de la défense.  En attendant, il a ordonné l’examen des listes des témoins cités à comparaître, hier mardi 27 mars 2018, au cours du procès de l’affaire « ministère public contre le général Gilbert Diendéré et 83 autres accusés », aux environs de 9h25. C’est la liste fournie par le parquet militaire qui a été d’abord portée à la connaissance de l’assistance. L’ancien président Jean-Baptiste Ouédraogo, l’archevêque de Bobo-Dioulasso, Paul Ouédraogo, les généraux Honoré Nabéré Traoré, Pingrenoma Zagré, Saïdou Maïga, l’ancien président du Conseil national de la Transition, Chériff Sy et 23 autres témoins et l’expert en cybercriminalité, Inoussa Sanfo, répondent tous présents. Mais, treize témoins du procureur Alioune Zanré sont « non comparants ». L’ancien Secrétaire général du ministère en charge de la défense, Alassane Moné, aujourd’hui ambassadeur en Egypte, est rentré vendredi 23 mars 2018 au Caire pour « régler les questions salariales des agents » de la représentation diplomatique, foi du procureur militaire. Il en est de même pour le Colonel-major Mamadou Traoré, attaché de défense à l’ambassade du Burkina en Algérie, parti mercredi 21 mars 2018 en Italie, pour des « questions de salaires et de logistiques». Quant à Honoré Nombré, il  a été malade et est en séance de rééducation. Le commandant Paul Henri Damiba, cité comme témoin, est en opération «rentre ce soir (hier) à Ouagadougou », a ajouté le ministère public. Toutefois, il a manqué d’arguments pour justifier la non-comparution de Eddie Komboïgo, expert-comptable et Achille Tapsoba, enseignant. « Ils ont été cités. Nous allons faire diligence pour qu’ils comparaissent devant votre juridiction », a dit Alioune Zanré, en guise d’assurance au président du tribunal. La défense a affirmé avoir pris acte des explications du parquet, mais s’interroge sur la possibilité de citer des ex-inculpés, au nombre de cinq, es-qualité de témoins. « Est-ce juridiquement possible ? », a demandé Me Paulin Salembéré, au tribunal et a exigé qu’ils soient entendus à titre de renseignement. « Il n’y a aucune entrave à la loi », a rétorqué Me Prosper Farama, de la partie civile. Le parquet militaire n’a pas eu de commentaire particulier, mais il a fait observer que tout ce qui n’est pas interdit par la loi est autorisé.
«Je n’ai reçu aucune citation»
Ensuite, la liste des témoins du Général de brigade, Gilbert Diendéré est livrée. Michel Kafando, président de la Transiition, Roch Marc Christian Kaboré, président du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) à l’époque, Yacouba Isaac Zida, ex-Premier ministre, Moogho Naaba Baongho, empereur des Mossé, les ambassadeurs de France et des Etats-Unis au Burkina au moment des faits, respectivement Gilles Thibault et Tulinabo Moshingi, etc. sont absents de la salle d’audience du procès. Sur ses 25 témoins, seuls trois se sont présentés devant les juges. Il s’agit des généraux Ali Traoré, Ibrahim Traoré et Brice Bayala. « Nous avons été informés par L’Observateur Paalga. Je n’ai reçu aucune citation », se sont indignés les deux premiers cités. Le troisième l’a appris dans la salle d’audience. La défense accuse le parquet militaire de n’avoir pas fait son travail, c’est-à-dire, cité les témoins à comparaître. De quoi offusquer le procureur militaire. Pour lui, aucune disposition légale ne l’oblige à citer le témoin d’un inculpé ou d’un accusé. Se basant sur les articles 106 et 116 du Code de justice militaire, Alioune Zanré a indiqué que la citation est notifiée par le parquet au prévenu ou à l’inculpé qu’il veut faire entendre, trois jours avant l’audience. « Un accusé qui veut faire comparaître un témoin doit prendre les dispositions nécessaires à cet effet, l’amener, l’héberger, le nourrir… », a-t-il expliqué. Citant les articles 50 et 435 du même code, la partie civile s’est étonnée de l’attitude des avocats de la défense. Les témoins sont cités pour comparaitre devant une juridiction et ladite citation est faite par voie d’huissier. «Qui d’autre qu’un accusé doit s’occuper de ses intérêts ?», s’est interrogé Me Guy Hervé Kam. Aussi, la partie civile a rejeté les listes des témoins, car n’ayant reçu aucune notification, alors que la loi dispose qu’elle doit en accuser réception, au moins 24 heures avant l’audience. Les avocats de Gilbert Diendéré ont battu en brèche les arguments du parquet militaire et de la partie civile. « Les notification et citations sont faites, sans frais, par la gendarmerie ou par tout autre agent de la force publique (…). L’accusé dépose sa liste auprès du parquet militaire par simple déclaration. Seul le parquet peut faire usage de la force publique», a argué Me Olivier Yelkouny, évoquant les articles 105 et 106 du Code de justice militaire.
Le président du tribunal, cité témoin de Djibril Bassolé
Me Yerim Thiam, avocat sénégalais de Djibrill Bassolé, a plutôt fait appel au bon sens du procureur militaire, afin qu’il notifie les citations à comparaître aux témoins de la défense. Me Seydou Yamba a jugé le «débat inutile (…). Un témoin n’est pas un supporteur, il vient apporter de la lumière». Le procureur militaire fait remarquer que la gendarmerie n’est pas le Tribunal militaire.
Dans le même sens, Me Prosper Farama a dénoncé les « amalgames et incongruités » de la défense et lui a demandé de s’assumer. «La citation des témoins incombe aux accusés, rien qu’à eux seuls », a-t-il soutenu. Et Me Neya de renchérir : «le ministère public n’est pas obligé de citer les témoins. A défaut d’une base légale, on évoque le bon sens, qui n’est malheureusement pas une loi».
Les accusés, Général Djibrill Bassolé, Léonce Koné et Hermann Yaméogo ont fait citer les mêmes témoins à comparaître. Il s’agit entre autres, des chefs d’Etat sénégalais Macky Sall, nigérien Mahamadou Issoufou, l’ancien président béninois, Yayi Boni, Yacouba Isaac Zida, Sita Sangaré, directeur du Tribunal militaire, Gilles Thibault, Tulinabo Mushingi, dont la liste a été transmise au Tribunal à 9h35. A 9h52, leur conseil, Me Yérim Thiam, a introduit une nouvelle liste, manuscrite, comportant un seul nom : Seydou Ouédraogo, par ailleurs président du tribunal. «Je l’ai fait tout en espérant que vous serez récusé et que vous comparaîtrez devant le juge qui vous remplacera», a justifié le bâtonnier sénégalais. Le ministère public déplore le manque de sérieux de l’attitude de la défense. Selon Alioune Zanré, les avocats ne souhaitent même pas que leurs témoins comparaissent. Sinon comment introduire une liste en début de journée et vouloir  que l’intéressé qui se trouve être président dans un pays tiers, se présente à la barre dans l’après-midi. «Il n’y a aucun caractère sérieux dans cette liste. D’ailleurs, il manque le nom de Guillaume Soro qui devait être le premier cité », a déploré Me Olivier Somé.
Il a qualifié la liste comportant le nom du président de « cas d’école d’abus du droit ». Pour Me Farama, c’est une cause d’incompatibilité, car Seydou Ouédraogo ne peut pas être juge et témoin. Et à Me Guy Hervé Kam de renchérir : « on a atteint l’étape ultime du manque de respect des avocats pour un tribunal ». Il n’en est rien, a répondu Me Thiam. D’abord, il n’y a pas de délai pour déposer une liste de témoins, même au cours des audiences, cela peut se faire. Ensuite, les témoins cités n’ont pas été invités à comparaître, hic et nunc. « Il n’y a rien de plus sérieux que ma liste… C’est au tribunal d’apprécier », a plaidé Me Yérim Thiam. Au total, le tribunal a reçu 12 listes de témoins cités à comparaitre. L’audience a été suspendue et reprendra le vendredi 30 mars 2018.
Djakaridia SIRIBIE/SIDWAYA
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Entendu au procès
La colère de la défense contre le directeur de la justice militaire
A la reprise du procès ce 27 mars 2018, les avocats de la défense ont dénoncé «un fait suffisamment grave». Selon eux, le directeur de la justice militaire, Sita Sangaré, est venu au procès pour expier les faits et gestes de leurs clients et leur a fait des remontrances publiquement. «Nous souhaitons que ce soit la dernière fois qu’il fasse des remontrances publiquement à nos clients», a assené Me Yelkouni Olivier. Pour cela, Me Yérim Thiam a souhaité que le tribunal fasse comparaître le Gal Gilbert Diendéré à ce sujet pour qu’on en sache davantage. Refus du président Seydou Ouédraogo qui a soutenu que les faits s’étant déroulés avant la reprise de l’audience, il ne voit pas la nécessité d’appeler l’ex-chef major particulier de la présidence du Faso à la barre. Il a toutefois affirmé qu’il prendra des dispositions afin que de tels actes ne se reproduisent plus.
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Le badge de la polémique
L’avocat du général Djibrill Bassolé, Me Yérim Thiam, a remercié le parquet pour lui avoir remis un badge pour le procès. Cependant, l’avocat sénégalais s’est insurgé contre le mot «putsch» mentionné sur le badge. Pour lui, il ne s’agit ni plus ni moins qu’une violation de la présomption d’innocence. «Nous sommes en train de juger l’affaire. On ne peut pas parler du putsch», a-t-il dénoncé. « Le mot putsch ne figure pas dans l’arsenal juridique burkinabè. C’est un mot français utilisé simplement par le parquet pour indiquer ce pour quoi nous sommes ici», a rétorqué  la partie civile.
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«Qu’on arrête de nous torturer »
L’avocat du général Djibrill Bassolé, Me Yérim Thiam, encore lui,  a estimé que les accusés sont torturés. «Si on nous torture, on torture les accusés. Qu’on arrête de nous torturer», a-t-il clamé. Il répondait au refus du parquet, de citer les témoins de la défense à comparaître. Ce qui n’est pas l’avis de Me Prosper Farama, qui a estimé que s’il y a quelqu’un qui est torturé, ce sont les victimes du coup d’Etat. «Un jeune de 12 ans qui souhaitait devenir un éminent avocat comme Me Thiam s’est retrouvé plusieurs mètres sous terre. Hélas, Il n’a même pas eu cette chance d’être torturé», a rétorqué l’avocat Farama à son confrère sénégalais.
Rassemblées par Anselme KAMBIRE/SIDWAYA
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