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Le narratif « démocratie contre autoritarisme » : une croisade contemporaine lancée par les États-Unis


L’histoire se répète d’une manière caricaturale. Il y a près de mille ans, la papauté en déclin a prêché des croisades en Orient, un épisode qui a duré 200 ans et pesé lourd sur les relations entre l’Orient et l’Occident. Aujourd’hui, les États-Unis, « papauté politique » du monde occidental, ont lancé une croisade contemporaine contre le monde non occidental sous la bannière « démocratie contre autoritarisme ». Une simple remontée dans le temps suffit à connaître les similarités entre le passé et le présent.

Invention d’un bon prétexte

À l’issue du Concile de Clermont en 1095, le pape Urbain II, en accusant les atrocités des Seldjoukides en Orient, a appelé les évêques à reconquérir la Terre sainte de Jérusalem et à aller au secours du peuple élu. Cet appel à la croisade s’est très vite étendu dans toute l’Europe occidentale.

Néanmoins, les prétextes, aussi légitimes soient-ils, ne sauraient dissimuler les motifs ignobles. La civilisation chrétienne à l’époque était très en retard par rapport aux civilisations orientales. La papauté, en connivence avec les seigneurs féodaux, qui avaient longtemps convoité la richesse de l’Orient, a formé « une troupe de saccage » avec des rôles bien répartis : incitation spirituelle par le pape et la conquête militaire par les seigneurs féodaux. Les croisades sont en réalité une opération de saccage contre une civilisation avancée.

Mille ans après, nous assistons à une reproduction exacte de cette tactique. Pour consolider et maintenir leur hégémonie, les États-Unis n’ont pas hésité à prendre les moyens les moins louables. De l’Asie de l’Ouest à l’Amérique latine, en passant par l’Afrique du Nord, le vent du « printemps démocratique » souffle aux quatre coins du monde, mais ne laisse que des pays en ruine : instabilité politique, guerres et conflits, misère sociale et difficultés économiques. « Doctrine Monroe », « révolution de couleur », « démocratie contre l’autoritarisme »…Derrière toutes ces idées se cache une obsession américaine de transformer les autres de manière chirurgicale et sous le couvert de la « démocratie ». Dans son livre Requiem pour le monde occidental, le directeur de l’IRIS Pascal Boniface a décrit la révolution démocratique menée par les États-Unis à l’échelle mondiale comme la « croisade du 21e siècle ».

Détournement de l’attention

À la veille des croisades, la papauté a vu son pouvoir fortement affaibli. Les seigneurs féodaux en Europe occidentale menaient des guerres incessantes pour conquérir des sphères d’influence. La famine régnait partout sur le continent et les populations vivaient dans une misère absolue. En Orient, l’Empire byzantin, héritier de l’Empire romain, faisait face à la menace des Seldjoukides. Dans un tel contexte, lancer une guerre à l’Orient semblait être le meilleur choix pour la papauté de détourner l’attention des peuples et de maintenir son pouvoir.

Mille ans après, les États-Unis, fragilisés par la polarisation politique et le déchirement social, ont fait un choix identique. Ni le parti démocrate ni le parti républicain n’a envie ni n’est capable de résoudre les problèmes structurels qui touchent au fondement du pays. L’un comme l’autre cherche à l’extérieur des solutions aux problèmes intérieurs. À l’ouest, ils font durer les conflits en Ukraine par tous les moyens pour affaiblir la Russie et prendre en otage l’Europe. À l’est, ils attisent les tensions au détroit de Taiwan, font monter le Quad et cherchent à créer une version Asie-Pacifique de l’OTAN dans l’intention de déclencher une « nouvelle guerre froide ».

Recours à la démagogie

Dans son discours Dieu le veut, le pape Urbain II a décrit l’Orient comme une terre de l’abondance où coulaient du lait et du miel. Il a promis le paradis à ceux qui seraient tués en combattant et la rémission de leurs péchés.

La démagogie du pape Urbain II a fonctionné. L’Europe occidentale toute entière s’est mobilisée pour se lancer dans les croisades. Les 200 ans d’expéditions, faites de sang et de larmes, ont semé des graines des conflits religieux qui ont duré jusqu’à aujourd’hui. De nombre d’enfants ont même été enrôlés lors de la cinquième croisade, qui sont pour la plupart morts en mer ou devenus des esclaves.

Mille ans après, les États-Unis jouent encore la carte de la démagogie. Faisant fi de leur dysfonctionnement intérieur, ils font du tapage avec frénésie sur la menace chinoise pour détourner le regard des Américains et construire une opinion publique hostile à la Chine. Pleinement conscients que plus les conflits en Ukraine traînent en longueur, plus l’Europe sera dépendante d’eux, ils persuadent d’une part les Européens de les suivre en invoquant leurs valeurs communes, et d’autre part, profitent du chaos en Europe pour en tirer des bénéfices. L’adoption des subventions « vertes » et de la loi sur la réduction de l’inflation (IRA) en est une parfaite illustration.

Agissements sans scrupule

Les croisades ont engendré des tragédies innombrables. Des musulmans ont été forcés de se convertir ou brutalement assassinés. Des juifs riches ont été pillés, tués et expulsés, et des civils innocents, massacrés et contraints de se déplacer. Le bûcher était fréquemment utilisé contre les païens… Ce qui est ironique, c’est que lors de la quatrième croisade, pour satisfaire leurs intérêts égoïstes, les croisés ont saccagé Constantinople, la ville qu’ils auraient dû sauver.

Mille ans après, pour préserver leur hégémonie, les États-Unis continuent de se livrer au saccage « au nom de Dieu ». D’une part, ils créent des instabilités partout dans le monde par l’ingérence militaire, la sanction économique, l’infiltration culturelle, la manipulation des élections et l’incitation aux troubles, et en profitent pour enrichir le complexe militaro-industriel américain qui a un appétit insatiable de se remplir les poches. D’autre part, ils s’accaparent la richesse du monde entier en valorisant la suprématie du dollar. Avec un billet imprimé à seulement 17 centimes, ils peuvent demander aux autres de leur fournir des biens et services équivalant à 100 dollars américains. Comme l’a dit l’ancien Secrétaire au Trésor américain John Connaly, « le dollar est notre monnaie, mais c’est votre problème ».

Ces dernières années, les États-Unis sont allés encore plus loin: s’approprier les actifs du peuple afghan, arracher les commandes de sous-marins de la France, faire sauter le gazoduc Nord Stream pour couper l’approvisionnement énergétique de l’Allemagne, sans oublier le fameux IRA qui menace même le fondement de l’industrie manufacturière européenne.

Fatalité de l’échec

Historiquement, les croisades se sont soldées par un échec complet. Avec l’apaisement de la ferveur religieuse, les gens ont commencé à prendre conscience de l’hypocrisie et de la violence sanglante de ces expéditions. La papauté, qui les avait lancées, est devenue le plus grand perdant. L’Église, autrefois puissante, a commencé à décliner, et le pouvoir ecclésiastique a finalement été remplacé par le pouvoir royal.

Mille ans après, l’hégémonie américaine est de plus en plus dysfonctionnelle. Paul Kennedy, dans son livre intitulé The Rise and Fall of The Great Powers, a indiqué que « Rome est tombée, Babylone est tombée, le tour de Scarsdale viendra ». Ce qu’il alerte, c’est qu’aucun empire qui prétend à l’hégémonie ne saurait échapper au déclin. Chaque fois que les États-Unis se livrent à des aventures militaristes, ils perdent de leur vigueur, et chaque chasse aux sorcières qu’ils pratiquent n’est rien d’autre qu’un aveu de faiblesse.

Les croisades du Moyen-Âge sont d’une époque à jamais révolue. Les États-Unis d’aujourd’hui ne sont plus ceux qu’on trouvait au débarquement de Normandie ou lors de l’effondrement du mur de Berlin. L’histoire se reproduira si on n’en tire pas les leçons. Après le « moment Kaboul », il est grand temps pour les États-Unis de mettre fin à leur obsession hégémonique.

Source: CGTN

Auteur: Yi Da est un spécialiste en relations internationales basé à Beijing.

NDLR: Cet article reflète le point de vue de l’auteur et pas nécessairement celui de CGTN encore moins de tinganews.com

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