Depuis l’annonce faite par le gouvernement burkinabè en mars dernier ordonnant un arrêt de l’activité de transport de passagers sur toute l’étendue du territoire national, les taximen peinent à joindre les deux bouts. Constat à Ouagadougou.
Assis sous un caïlcédrat, les taximen de la gare de l’Est à Ouagadougou discutent de tout et de rien, en cette matinée du mardi 14 avril 2020. Depuis les mesures prises par le gouvernement pour éviter la propagation du COVID-19, leur gagne-pain est à l’arrêt. Avant que l’équipe de Sidwaya ne se dirige vers le prolixe du groupe, un chauffeur au visage triste lance ceci:
« Nous allons redémarrer les moteurs de nos véhicules si rien n’est fait dans les jours à venir. Nous préférons mourir de COVID-19 que de faim ».
Le responsable des taximen de ladite gare, Saïdou Ouédraogo, dit apprécier les mesures du gouvernement et les efforts consentis pour les populations. Néanmoins, pense-t-il, des solutions adéquates peuvent être trouvées, pour pallier cette situation. « Nous sommes conscients que la maladie fait des victimes. Mais tant que nous ne reprenons pas notre activité, nous ne mangerons pas.
Le fait d’être cloîtré tous les jours à la maison amène des petites disputes », affirme amèrement M. Ouédraogo. Il note que les taximen ne sont pas les seules victimes de cette mesure. Car, pour lui, des fonctionnaires qui avaient l’habitude de rejoindre leur service en taxi, sont aussi touchés.
Face à cette situation, il supplie le gouvernement de leur permettre de reprendre leur activité, tout en veillant à ce que les taximen appliquent strictement les mesures barrières, à savoir le port des cache-nez obligatoire pour les clients et la présence du gel hydroalcoolique dans les véhicules pour le lavage des mains, mais aussi de fixer à trois le nombre passagers par taxi.
Le responsable ajoute que le gouvernement leur avait proposé le renouvellement de leur parc mais jusque-là rien n’est fait. Selon lui, la distribution des vivres n’est pas la meilleure solution et cette initiative ne pourra en aucun cas, leur permettre de mieux s’occuper de leurs familles. « La fois passée, on a donné quatre tonnes de riz aux syndicats pour une cinquantaine de cellules. Ne pouvant pas les partager, au regard du nombre élevé de personnes, nous avons été obligés de les remettre à nos malades et à certaines de nos veuves», déplore-t-il.
Abondant dans le même sens, Lassané Sawadogo crie son ras-le-bol, même s’il reconnaît que la maladie touche le monde entier. Il souligne que des dispositions ont été prises pour les transporteurs dans d’autres pays de la sous-région tandis qu’au pays des Hommes intègres, ces derniers semblent oubliés.
Reprendre vaille que vaille
Un de ses fils vivant au Sénégal, rappelle-t-il, l’a informé qu’au pays de la Téranga chaque famille a eu droit à une enveloppe de plus de 150 mille F CFA. « Un homme ne peut pas marcher les poches vides. Je faisais chaque jour de bonnes recettes. Je pouvais rentrer le soir avec au moins 5000 F CFA. Mais de nos jours, tout est au ralenti et je ne peux même avoir 300 F CFA. Nous souhaitons que cette maladie disparaisse le plus tôt possible», implore-t-il. M. Sawadogo souligne que si un conducteur veut aller en ville, il faut qu’il ait sa carte de syndicat avant que la police ne le laisse passer.
Afsétou SAWADOGO/sidwaya