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Bernadette Sanou/ Dao, ancienne ministre de la Culture burkinabé: « Tout et tout de suite n’est bêtement possible dans aucune situation »


Résultat de recherche d'images pour "bernadette dao"Admise à la retraite en 2011, Bernadette Sanou/Dao, ancienne ministre de la Culture du Burkina Faso et personne ressource dans ledit secteur. Secrétaire permanente de la section ouest-africaine de la fondation STROMME dans son volet éducation, elle nous parle de sa structure, du niveau de l’éducation, du rôle des acteurs pour remédier à la situation et surtout du Burkina post-insurrection.

Qui est Bernadette Sanou/Dao et que fait-elle depuis sa retraite?

J’ai passé le plus clair de ma carrière dans la Fonction publique burkinabè, dans le secteur de l’Education. Je voudrais profiter de votre espace pour remercier les services en charge de l’Education. Parce que tout ce que je véhicule, tout ce que je transporte comme expérience dans ce domaine m’a été conféré par lesdits services de mon pays. J’arrivais à la retraite quand j’ai eu l’opportunité de nouer contact avec la fondation STROMME, qui est une ONG internationale norvégienne. Elle œuvre pratiquement sur tous les continents. En Afrique particulièrement la partie Ouest, elle travaille au Burkina Faso, au Mali et au Niger dans l’éducation et la miro-finance communautaire. Moi, je suis naturellement dans le secteur de l’éducation où je m’occupe de la Stratégie de scolarisation accélérée passerelle (SSAP) mise en œuvre dans les trois pays. En accord avec les ministères de l’Education de ces pays, un Secrétariat sous-régional a été mis en place pour s’occuper de la coordination de la mise en œuvre de cette stratégie. J’ai eu le privilège d’être cooptée comme Secrétaire permanente de la section sous-régionale depuis sa création en 2010-2011.

De façon concrète, quel est l’apport de votre structure dans l’éducation au niveau des pays où elle intervient?

Nous nous occupons des enfants hors école, âgés de 8 à 12 ans. La stratégie consiste à faire en sorte de ramener ce public vers l’école classique en leur offrant cette stratégie de 9 mois (d’octobre à juin) qui correspondent à une année scolaire. Quand ils passent par ce programme qui est un condensé des programmes, ils peuvent être intégrés par la suite à l’école primaire. Le programme est composé d’une sélection des programmes des trois premières années de l’école primaire. Si bien qu’à l’issue, ils peuvent être intégrés en quatrième année de l’école primaire, c’est-à-dire le CE2 pour continuer leur cursus normal. La stratégie est en marche depuis 2004 au Mali. Elle a été introduite au Burkina Faso en 2006 et en 2007 au Niger. Les premiers sortants de la stratégie sont pratiquement à l’université. C’est pour vous dire que la stratégie marche, sans vouloir faire de la propagande mensongère. A ce jour, nous avons plus de 130000 à 150000 enfants que nous avons pu ramener à l’école, dont 90000 filles.

Vous avez passé le plus claire de votre carrière dans l’éducation. En votre qualité de personne ressource, comment appréciez-vous le niveau de l’éducation aujourd’hui au Burkina Faso?

Vous savez, quand on parle du niveau de l’éducation, je suis toujours très prudente. On dit que les choses ont chuté alors qu’on ne prend pas en compte tout ce qui influence le contexte de l’éducation et qui fait qu’il y a plus de difficultés aujourd’hui à intéresser les enfants, plus de difficultés à les encadrer, à les motiver… Je pense qu’il faut prendre toutes ces choses en compte.

Lesquelles?

Les enfants ont tellement d’autres sujets et d’autres centres d’intérêt dans le contexte actuel. Ils peuvent lire beaucoup de choses sur Internet; ils peuvent s’auto-informer. Je ne dis pas que c’est toujours bien orienter, mais, ils ont plusieurs canaux d’auto-information, d’auto-éducation qui font qu’il faut vraiment relativiser les choses et apprécier d’autant plus les efforts qui sont déployés de parts et d’autres. Savoir apprécier ce qui se fait avant de dire que ça ne va pas, on ne fait pas ceci, on ne fait pas cela. Il est important de savoir tout ce qui doit être pris en compte avant de juger.

Des propositions peut-être?

Il faut d’abord que les élèves reviennent à l’essentiel et sachent que les tous premiers pas de l’apprentissage, c’est la classe. Et qui s’y intéresse, ne le regrette pas. Oui à l’Internet, oui au Smartphone dont nous apprécions tous l’apport en termes d’informations. Mais, si vous avez la personne physique devant vous, qui s’évertue, qui va piocher et qui prépare son cours pour vous mettre dans les conditions d’apprentissage, il faut l’écouter et s’intéresser à lui. Je ne pense pas que les enseignants allaient perdent leur temps dans les écoles s’ils n’avaient pas à cœur leur métier d’éducateur. Il faut donc savoir les encourager et apprécier tout ce qu’ils font.

Ensuite, que les enseignants ne se laissent pas entraîner par la mouvance! Qu’ils fassent leur travail d’éducateurs à fond et qu’ils ne se disent pas que j’ai beau faire, ça va venir de là. Non ça ne peut que venir d’eux et ils doivent creuser et revaloriser leurs rôle et place. Il ne faut pas avoir peur des devoirs parce que vous avez 55 élèves ou plus! Non, il faut faire les devoirs, les corriger, il faut, il faut…

Parlons d’autre chose. Que pensez-vous du Burkina Faso post-insurrection où les populations continuent de faire des réclamations, parce qu’elles sont insatisfaites?

Je pense que le cas du Burkina est l’évolution normale des choses. Aujourd’hui, les populations pensent qu’elles ont droit à la parole; elles s’expriment sur la vie de la nation. Mais, je dis que quand on s’exprime, il ne faut pas que ce soit, «je casse tout». «Je casse tout» n’est ni un droit ni un acte citoyen; encore moins la solution, ni pour celui qui le fait, encore moins pour celui dont la maison a été brûlée et réduite en cendres. Il est toujours préférable d’obtenir un compromis par le dialogue, la concertation…

Que dire des réclamations sans cesse des Burkinabè après avoir élu l’actuel président?

Là, je ne suis pas d’avis avec ces réclamations à n’en pas finir. Vous avez dit que ça n’allait pas! Chose qui reste à vérifier. Alors, il faut accompagneret avoir de la patience. Tout et tout de suite, ce n’est tout bêtement pas possible. Je l’ai dit à mes enfants, tout et tout de suite, ce n’est possible dans aucune situation. Tout et tout de suite, c’est tout de suite des problèmes. Le terme, à nous de le fixer ensemble. Le terme on n’avait pas dit que c’était pour demain ni pour après demain! Alors, pourquoi veut-on qu’au bout d’un an, ce soit le terme? Je veux savoir quels ont été les termes du contrat, pour qu’aujourd’hui on s’insurge contre ce contrat. Il faut donc être conséquent. On se positionne par rapport à quoi, pour dire qu’aujourd’hui on a été trahi. Je suis donc toujours perplexe.

Un appel à l’endroit de vos compatriotes, surtout la jeunesse?

Il faut qu’on se mette au travail. Il ne faut pas que les gens pensent que c’est tout de suite et maintenant. L’emploi est peut être difficile, mais le travail existe. Partout au Burkina, on a que du travail sur la planche. Il y a tellement de critiques si bien qu’on peut s’interroger sur l’apport de ceux qui critiquent. Notre pays ne pourra donner que ce qu’il a, pas l’impossible. Et le possible est de notre responsabilité à nous tous. Je lance donc un appel à la citoyenneté, au positivisme dans nos actions et une certaine patience.

Interview réalisée

par Souro DAO

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