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Entretien avec Kader Ousmane Sanogo, initiateur de la rébellion ivoirienne : « Blaise et Soro, c’est pile et face d’une même pièce »


Ancien membre de la rébellion ivoirienne et son initiateur même, c’est lui qui en aurait proposé l’idée de la création à IB (Ibrahim Coulibaly), Sanogo Kader Ousmane en a ensuite été spolié, selon lui, par Guillaume Soro et Blaise Comparé. Après avoir mené le combat sur le terrain jusqu’à ce que Alassane Ouattara soit président, Sanogo a été arrêté en 2004, suite aux purges de Soro, qui a tenté de récupérer la rébellion. L’ancien mentor de la rébellion est sorti miraculeusement vivant après deux ans de prison. Il est en ce moment au Burkina pour éditer un livre qu’il ne pouvait pas éditer en Côte-d’Ivoire. Auparavant du reste, Sanogo avait tenté de publier son livre au Mali, aux éditions Jamana, mais l’éditeur malien qui a rencontré le ministre ivoirien, Bakayoko, aurait reçu de ce dernier huit cent millions pour bloquer la parution du livre qui est une « bombe qui allait mettre la Cote d’Ivoire à feu et à sang ». Un des chapitres parlerait, semble-t-il, d’une plainte que l’auteur devait déposer contre Guillaume Soro. Après la chute de Blaise Compaoré, M. Sanogo peut maintenant éditer son livre au Burkina. Mais à Ouagadougou, la parution du livre, pourtant dédicacé le 28 avril dernier, est également bloqué au motif qu’il ne peut pas être vendu parce qu’il porte le logo de Sidwaya qui est une maison d’édition étatique. C’est comme, disent les autorités, s’ils donnent un bâton pour chicoter la Côte d’Ivoire. Les révélations de Sanogo ne seront pas sans provoquer des secousses politiques, tant en Côte-d’Ivoire qu’au Burkina.

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Quel est l’objet de votre présence à Ouagadougou ?
Je suis venu au Burkina pour éditer un livre qui ne pouvait pas être édité en Côte d’Ivoire. J’ai eu tant de déboires. J’ai d’abord été au Mali aux éditions Jamana, au quartier Hamdalaye. J’ai même payé beaucoup d’argent au Mali pour l’édition. Autour de 5 millions. Malheureusement, le livre n’a jamais vu le jour puisqu’il semble que la maison d’édition est allée rencontrer le ministre Hamed Bakayoko qui lui aurait remis 800 millions pour bloquer mon livre, parce qu’il semble que c’est une bombe qui allait mettre la Côte d’Ivoire à feu et à sang. Alors que je ne vois pas en quoi le livre est une bombe. Dans mon livre, il y a un chapitre où je parlais d’une plainte que je devais déposer contre Guillaume Soro. Quand le ministre m’a reçu, je cherchais la page où j’ai fait cas de cette affaire, et c’est le ministre qui m’a dit qu’il s’agit de la page 43 du troisième chapitre. C’est là que nous avons trouvé ce que nous étions en train de chercher. On a donc échangé sur la partie. C’est vrai qu’il ne m’a pas mis aux arrêts. En sortant, j’ai croisé un cousin qui m’a dit que le ministre avait le roman avant moi. Je lui ai dit effectivement que c’était le cas. Puisque le ministre me reçoit pour la première fois, je lui parle de mon livre et c’est lui qui connaît mieux le roman que moi qui l’ai écrit. Seulement, il y a eu deux versions, parce que lui m’a dit que c’est la maison d’édition qui est venue voir le ministre pour prendre les 800 millions et bloquer l’ouvrage. Un autre collaborateur du ministre me fait croire que c’est 200 millions que le ministre a donné. Bref, je ne sais pas à quelle fin, mais mon roman a été bloqué au Mali. Il faut que le monde entier sache. C’est après ça que je suis venu à Ouagadougou dès que Blaise Compaoré est tombé. Blaise et Soro, c’est pile et face d’une même pièce. Je ne pouvais donc pas éditer le livre à Ouaga. Mais quand Blaise est tombé, je suis venu et cela fait trois ans et demi que nous sommes dans cette affaire de roman.

Qu’est ce qui se passe concrètement avec l’édition du livre ?
J’ai fait la dédicace du roman le 28 avril 2017. Malheureusement le roman a été bloqué après l’impression. On m’a dit que le Président du Faso Roch Marc Christian Kaboré, le président de l’Assemblée, feu Salifou Diallo, le Premier ministre et le ministre de la communication ont dit que le roman ne pouvait pas être vendu parce qu’il porte le logo de Sidwaya qui est une maison d’édition étatique. C’est comme s’ils me donnaient un bâton pour chicoter la Côte d’Ivoire. Ce qui n’est pas bien. A la suite, quand j’ai échangé avec le DG dans le courant de cette semaine (25 au 30 septembre 2017, ndlr), j’ai compris que, peut-être, Roch n’est même pas mêlé à ces choses-là, ni le président de l’Assemblée. C’est plutôt le DG qui, après le tapage des gens sur le net, a entrepris de bloquer mon roman. J’ai été désillusionné de le savoir. Ils n’ont pas été sincères avec moi. Sidwaya a un comité de lecture et ils auraient dû me dire qu’ils ne peuvent pas éditer le roman. Mais accepter d’éditer le livre et le bloquer, je ne comprends pas. J’ai fait éditer 5 000 exemplaires qui se retrouvent bloqués à Sidwaya. Et c’est malheureux. Je pouvais engager une procédure judiciaire contre eux mais c’est une perte de temps et ce n’est pas là mon combat. Tout ce que Dieu fait est bon et j’ai demandé à ce qu’on me rembourse ce que j’avais donné pour l’édition. C’est ce que Sidwaya a fait depuis hier (29 septembre 2017). Je vais retrouver mon pays où je pense que le combat peut être mené. Aujourd’hui, ce que j’ai prédit à Sidwaya le 28 avril 2017, les gens n’ont pas voulu accepté cette triste réalité. On m’a traité de fou parce que ce que j’ai dit était impensable. Oui, Soro était le premier ministre, ministre de la défense. Aujourd’hui, il est le président de l’assemblée nationale. Venir dire qu’il complotait contre Alassane Ouattara, les gens ne pouvaient pas me comprendre. Et pourtant ! Et pourtant c’était vrai. J’avais la conviction de ce que j’avançais et j’ai même dit que ce n’est pas un roman mais un livre témoignage parce qu’un roman c’est de la fiction avec des titres inventés. Mais ce que je disais était vrai. J’ai proposé la création de la rébellion à IB et quand il l’a créée, j’étais à ses côtés et on est allé chercher le financement avec Kadhafi. La rébellion, c’est Kadhafi qui l’a financée, il a donné des armes qui, malheureusement, ont été bloquées par Blaise pour surarmer le RSP. Voilà pourquoi, quand les autorités de la transition ont demandé à Diendéré de donner les armes du RSP, il a dit que ces armes n’appartiennent pas au Burkina. Voilà la vraie provenance de ces armes. Il faut que l’Afrique aille de l’avant et nous ne devons plus rentrer dans ces clivages. Je sais que je dérange, mais j’ai pris l’initiative. Peu importe ma vie, pourvu que les gens sachent la vérité. De toutes les façons, aujourd’hui, les populations du Burkina comme de la Côte d’ivoire ne sont plus des analphabètes. Dans un village, dans les années 1960, quand nous allions aux indépendances, on ne pouvait pas avoir un seul cadre qui avait le CEP. Il y avait plein de villages du Burkina et chez moi où c’était le cas. Mais aujourd’hui, on peut former un gouvernement entier à partir de chaque village. On peut trouver des agrégés, des financiers, des juristes, des enseignants dans toutes les disciplines. C’est pour dire qu’aujourd’hui l’Afrique a besoin de la vérité. La politique qui dit qu’il y a des sujets qu’on ne doit pas aborder sur la place publique, top secret ou défense, c’est faux. Si vous construisez dans la voie de la vérité, vous n’avez rien à cacher. Je me suis montré aux ivoiriens pour dire que c’est moi qui ai proposé la guerre à IB. Je suis prêt à aller même à la CPI pour témoigner. De quoi aurais-je peur ? La CPI et l’ONU étaient là quand on excluait Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire. Est-ce qu’ils ont levé le petit doigt pour condamner ? Il faudrait que l’Europe sache qu’il ne suffit pas de condamner un acte, il faut plutôt l’empêcher. Et c’est ce que les institutions internationales ne font pas. Ce sont des machines lourdes qui ne fonctionnent pas et nous devons en Afrique prendre notre destinée en main. Si on avait empêché Henri Konan Bédié d’intégrer l’ivoirité, on n’allait pas avoir de guerre.

Mais la guerre a fait des victimes innocentes !
La guerre a ses règles. Quand on l’a créée, ce n’était pas pour tuer des innocents comme Soro l’a fait. Aller prendre des gens chez eux à la maison et les tuer, voler, piller et autres. Non ! La guerre a ses règles. La convention de Genève est claire. Si vous faites un prisonnier de guerre, si vous le désarmer, vous ne devez pas le tuer. Par ailleurs, il faudrait qu’Alassane Ouattara mette fin à la justice des vainqueurs. Il faut que Soro réponde à la CPI, et c’est mon combat. Je suis prêt à répondre parce que j’ai contribué à la guerre. Je dois répondre de mes actes. Même devant Dieu. Nous avons, avec IB, mené un combat noble mais malheureusement le destin a voulu que IB n’en profite jamais parce qu’il était un exilé politique. IB ne pouvait pas parler, ni bouger du Burkina. C’est Soro qui était sur le terrain comme le porte parole et qui a profité pour le court-circuiter.

Comment s’est fait le déploiement de la rébellion ?
Kadhafi a donné 62 milliards, 2 milliards pour Blaise et 60 milliards pour la rébellion. L’avion cargo a fait 7 voyages de la Libye au Burkina avec les armes parce qu’on ne pouvait pas venir en bateau, étant donné que le Burkina n’a pas de port. Nous n’avons pas pu bénéficier des armes lourdes. Blaise les a bloquées pour équiper le RSP qui, finalement, n’a pas pu le protéger. Lorsque nous voulons faire quelque chose, il faut le faire dans la légalité et avoir la crainte de Dieu. Ce que Blaise n’avait pas. Si nous avions les moyens que Kadhafi avait mis à notre disposition, Gbagbo tombait la même semaine ou la même nuit. IB allait présider la transition. Le destin aussi a joué contre lui et c’est la triste réalité de la vie. A la suite, la rébellion nous a échappé, par la faute de Blaise, pour des raisons financières. Kadhafi avait donné un chèque blanc pour dire qu’à tout moment on pouvait aller chercher l’argent jusqu’à 100 milliards. Nous avons été empêché par la suite de nous approcher de Kadhafi, et c’est Blaise qui a géré le dossier et je sais que les 100 milliards là il les a pris. Sans compter les autres avantages. Quand dans une guerre les conflits d’intérêt, d’argent, de diamant, etc. se mêlent, vous allez vers un échec, vers une catastrophe. C’est pourquoi la rébellion a duré 10 ans. Blaise a certes aidé la rébellion, Blaise en a largement profité et il a fait souffrir énormément le peuple ivoirien pendant de longues années. C’est ce que je tente de faire savoir aux gens. La loi quand elle est impartiale, elle est valable pour tout le monde mais quand elle est partiale, vous allez dangereusement vers une crise, voire une guerre. C’est ce que nous avons connu en Côte-d’Ivoire.
Je profite demander aux peuples ouest-africains, d’éviter ce genre de lois dans leurs pays. En côte d’Ivoire, Alassane dit qu’il est ivoirien. C’est vrai que son père est de Sindou, mais son père et son grand-père s’étaient installés en Côte d’ivoire. Aujourd’hui les choses ont évolué. Certes, le Burkina l’a proposé pour être le vice-président à la BCEAO, mais il pouvait aussi se réclamer ivoirien également comme il pouvait se réclamer Burkinabè. Je ne rentre pas dans ce débat. On pouvait le laisser se présenter aux élections et c’est aux Ivoiriens de l’humilier dans les urnes en ne le votant pas. Mais dire qu’il est Burkinabè pour l’empêcher, c’est un problème. Mais ça ne se limitait pas à la personne d’Alassane.
Au cours d’un contrôle routier à Adjamé, un policier a voulu bloquer ma carte d’identité et j’ai failli en venir aux mains pour retirer ma carte parce qu’il me considérait comme un envahisseur, un Burkinabè. Mais Sanogo n’est pas Ouattara, et je ne suis pas Alassane. J’ai compris que ce n’est pas pour Alassane que la loi a été mise en place. L’article 11 de la constitution demandait qu’on soit de père de source multiséculaire et Ivoirien pour être candidat. Cela excluait le Nord. La France, ni l’ONU, n’a rien fait pour empêcher cela. L’Afrique ne doit pas vendre sa destinée parce que les Africains sont trop attachés à l’argent. Tout est l’argent. Je vous ai dit que Blaise nous a trahit à cause de l’argent. Quand un président vient au pouvoir, il veut y rester à cause de l’argent. Mais nul n’a créé le monde, c’est Dieu. Blaise pensait que sans lui le Burkina ne pouvait pas être présidé. Mais c’est faux. Avant lui, il y a eu des présidents, et aujourd’hui il n’est pas là mais il y a eu des présidents. Il suffisait qu’il organise des élections et qu’il parte. Il choisit quelqu’un pour le remplacer, soit Djibril Bassolé que j’ai eu la chance de côtoyer, Roch, etc. j’ai travaillé avec Salifou Diallo mais sans vous mentir, il était le fin stratège burkinabè.

Djibril Bassolé a-t-il été également un acteur de la crise ivoirienne ?
Bassolé, c’est vrai, a joué un rôle négatif dans la crise ivoirienne mais au début il a joué un rôle positif. Si je dis qu’il a joué un rôle négatif, c’est que c’est lui qui nous a donné le visa à 18h en faisant croire à IB que tout était prêt pour renverser Gbagbo. Alors que c’était un piège de Blaise. Djibril était trop un sujet de Blaise, son serviteur. Aujourd’hui, la seule chose que je peux demander à Djibril Bassolé, s’il recouvre sa liberté, et que s’il a un devoir national à accomplir, qu’il regarde le drapeau national. Et moi je peux vous dire que même si Alassane me nomme aujourd’hui à un poste de responsabilité, et il me dit de faire quelque chose qui n’est pas dans l’intérêt de la nation ivoirienne, je vais le déconseiller ou je rends ma démission. Djibril pouvait dire à Blaise de ne pas écarter IB, mais il a laissé faire. Ils ont profité de l’argent que Kadhafi a mis à notre disposition, et c’est malheureux. Sinon au début, Djibril a été l’homme qui nous a beaucoup aidés en étant auprès de Blaise. Ils nous ont lâchés pour Soro Guillaume. Et l’écoute téléphonique entre Djibril et Soro est très vrai. Ces deux-là ont fait beaucoup de choses ensemble.

Quels étaient les enjeux de votre rébellion ?
Ce n’est pas de l’amertume mais je peux dire que le combat est gagné. Dès qu’on crée une rébellion, on te prend comme un ennemi de l’état et on cherche à t’abattre. Même tes parents ne sont pas à l’abri. Même quand vous arrivez à la créer, vous vous mangez. La rébellion avale souvent ses enfants. En créant la rébellion, nous nous sommes dit que si Gbagbo tombe et qu’Alassane gagne, même si nous mourons, nous avons atteint notre objectif. Je pense que IB a atteint son objectif, et je dis merci à Dieu. Aujourd’hui même, si je meurs, je peux tranquillement aller au paradis. Même si Alassane ne m’a donné aucun poste. Même pas un centime. Mais je suis content parce que l’Ivoirien du Nord est respecté au même titre que l’Ivoirien du Sud. C’est quelque chose qu’on ne pouvait pas aller quémander. C’est notre droit et on a mené une guerre de droit. Dieu connait la vérité et c’est lui qui pourra nous récompenser à juste titre si la récompense des vivants tarde à venir. C’est pourquoi, à travers le livre, je tente de rétablir la vérité. Soro, en voulant se présenter en 2020, tente de faire croire aux gens que c’est Alassane qui a financé la rébellion avec Bédié. C’est faux. C’est de l’affabulation. Alassane est un homme assez démocrate, un homme de paix. J’ai proposé à Alassane de créer la rébellion et il m’a dit qu’il ne rentrait pas dedans. Et IB m’a dit qu’Alassane n’a pas donné un rond. Mais Soro a fait croire à Alassane que si on saute IB, lui allait avoir un droit de regard sur la rébellion. Alassane a vu Blaise, et c’est comme cela qu’ils ont sauté IB. Peut être qu’en ce moment on peut dire qu’Alassane a apporté une aide à la mégalomanie de Soro, mais Alassane n’a jamais financé.

Vous avez été un des instigateurs de la rébellion avant d’être écarté. Quelles sont les raisons qui ont conduit à votre mise à l’écart ?
Il n’y a pas de raisons évoquées. J’ai été arrêté quand Soro a tenté de récupérer la rébellion. Il a fait une purge en 2004, et j’ai été arrêté. J’ai fait deux ans de prison. Vous revenez sur des événements douloureux que je n’aborde pas souvent. Si je l’évoque, certains qui ne comprennent rien vont dire que je mens ou que j’exagère. Pourtant, c’est vrai. J’ai souffert comme Nelson Mandela. Je ne dis pas que je suis le nouveau Mandela africain. Mandela, durant ses années de prison, était dans une prison située sur une île où il cassait des pierres et faisait des travaux forcés. Cela était une prison paisible. C’est un paradis. Quand je dis que j’ai souffert autant que Mandela, pendant mes deux années de prison j’ai fait le container de poisson. Container A et container B. Si tu fais huit heures dans le premier et tu ne meurs pas, on te met dans le second container. Là, tu pouvais faire un mois, deux mois, en prison. Et c’est pour ceux qu’on voulait laisser vivre. Sinon tu ne passes pas l’étape des deux containers. J’ai fait les deux containers. Quand on t’envoie à la villa secrète, appelée le couloir de la mort au blindé, à une heure du matin, on vient ouvrir la prison et on vous arrose avec des balles. Tu peux prendre une balle. J’ai des amis qui ont pris des balles et le sang a rejailli sur moi. Quand tu sors de là, tu es abattu psychologiquement. On ne venait pas ouvrir une prison pour tirer sur les Mandela. On m’a tabassé et on m’a cassé cinq dents. C’est l’Opération Licorne et la Croix Rouge qui m’ont soigné en prison.

Qui était derrière tout cela ?
C’est Soro Guillaume. C’est ce que je suis en train de vous dire. Il a fait une purge où Adams a été tué, Kass a été tué. En tant que chargé de mission principal du MPCI, j’ai été arrêté. A ma sortie de prison en 2006, Soro a voulu que je travaille avec lui parce qu’on lui a dit que je suis un spirituel et si je suis près de lui il pourrait être président. Soro m’a dit qu’il veut être président parce que Alassane ne peux rien devenir en Côte d’Ivoire. Je lui ai répondu, ce jour, en lui disant que jusqu’à ma mort c’est Alassane que Dieu m’a révélé comme président. Je ne peux que servir Alassane et non Soro. Soro m’a donné une villa à Ouaga 2000, une somme de 25 millions et une voiture (une Toyota 4×4 neuve) que j’ai refusés. Je lui ai dit que je ne pouvais pas prendre cet argent. Il a menacé de me renvoyer en prison à Korogho. Je lui ai dit non. Au lieu de m’envoyer à Korogho, mets-moi en prison à Bouaké. Le jour que tu veux, tu peux me tuer, mais je n’accepterai pas te servir si ce n’est pas Alassane. On s’est séparé le 26 février 2006. Après, il est passé par Samassi Baba pour demander que je vienne travailler avec lui et j’ai dit non. Je lui ai proposé de me laisser entrer à la présidence, là, je peux être son œil et son oreille sur place. C’est ainsi que j’ai intégré le service intendance de la présidence. J’avais mon cousin Tiho Nguessan qui m’a aidé à entrer. A l’intendance militaire de la présidence, j’ai aidé Soro. J’ai contribué en lui donnant des renseignements. Après, Soro m’a mis dans son service de renseignement. Notre chef s’appelait M. Yao. Quand Gbagbo a fomenté le complot de l’avion, c’est moi qui ai averti Soro. Je lui ai écrit une lettre de 3 pages où j’ai tout notifié. Il m’a reçu après et on a tout planifié. Dès qu’il prenait un vol, il devrait s’asseoir à l’arrière et non à la classe affaire. J’ai fait tout cela parce que je savais que IB n’allait pas organiser les élections, mais c’est plutôt Soro. Dieu me l’avait révélé. Mais Soro aussi, après l’organisation des élections, sa mission politique devrait prendre fin. Pour cela il faut que je vous le dise. Je sais que Soro tombera. Quand on n’est pas sur la voie de la vérité, on ne peut pas survivre. J’ai sauvé Soro, mais cela ne m’a pas plu qu’il ait sacrifié sa garde rapprochée. Sachant qu’ils allaient tirer sur l’avion à l’arrivée, Soro devait quitter la classe business pour s’asseoir derrière. Mais il a laissé une partie de sa garde rapprochée qui est restée dans l’attaque. Sinon pourquoi Soul to Soul et Alain Lobognon ne sont pas morts ? Pourquoi Soro lui-même n’est pas mort ? Alain Lobognon dit à certaines personnes que la roquette est passée entre lui et Soro. C’est faux. Ils étaient tous à l’arrière sur la banquette de l’avion. C’est moi qui les ai sauvés et je ne l’ai pas fait pour de l’argent.

Vous étiez dans l’avion ? 
Non. J’avais dit à Soro ce qui allait se passer. Et Soro est venu me féliciter. Mais il ne m’a remis que 2 millions pour me dire que je viens au travail à pied, de m’acheter une voiture. Est-ce qu’on peut acheter une bonne voiture de nos jours à 2 millions ? Mais j’ai pris l’argent. Ce qui me fait rire, c’est qu’il pense qu’en ne me donnant pas de moyens pour vivre, j’allais venir totalement vers lui. Chose que je ne ferai pas. Même le grand Alassane quand il m’a reçu en 2000, je lui ai dit qu’il ne pouvait pas être président en 2000. Il voulait revenir en 2010. Il a dit qu’il était prêt financièrement. Il est rentré et il m’a dit de l’aider. Alassane m’a montré 60 milliards. Je lui ai dit M. le président, je ne prendrai pas 5 francs de cet argent. Il me demande pourquoi ? Je lui ai fait savoir que c’était contraire à la charte de Dieu. Dieu ne peut pas me montrer qu’Alassane sera président en 2010. Ce dernier veut être candidat en 2000. Si je prends son argent et il n’est pas élu, pour le commun des mortels c’est normal et il peut être président après. Mais pour moi l’homme spirituel, cela n’est pas normal. Dieu peut me tuer si je prends cet argent d’ailleurs. Même s’il ne me tue pas, je m’en voudrai. Il y a des fautes que nous spirituels on ne fait pas. L’argent est certes bon mais on ne peut pas le prendre peu importe les conséquences. Je n’irai jamais faire des courbettes pour des postes politiques. Je ne vais pas non plus mentir pour avoir de l’argent. Ce que Dieu veut que j’ai, un jour je l’aurai. La preuve, je n’ai pas assez de moyens et je cours de pays en pays, je suis un sans abri. Si j’avais volé pendant la guerre, je me serai acheter des maisons ici à Ouagadougou comme de l’autre côté. Mais ici je suis en location à Paglayiri. La guerre version IB, on avait juré sur le coran avant d’aller. Si tu prenais quelque chose qui ne t’appartenait pas, on te fusillait. Quand Soro a pris les commandes, vous avez appris qu’on a cassé des banques, on a pillé la BCEAO de Man, de Korogho, de Bouaké, etc. La révolution quand on la mène, c’est pour une cause. C’est pour libérer un peuple opprimé, un peuple victime d’une injustice. Mais la rébellion glisse parfois pour aller sur le terrain de l’argent, de l’or, du diamant. C’est ce que nous avons vécu en Côte d’Ivoire. C’est parce qu’Alassane est puissant qu’il a pu organiser des élections et à amener la communauté internationale à pousser la main à Gbagbo avec les embargos et les sanctions pour le contraindre à partir. S’il s’agissait de Soro, on n’allait jamais arriver à des élections. Soro se plaisait à la primature, il avait tout ce dont il voulait. Qu’il y ait élection ou pas, Soro était à l’aise dans son coin. Quand il dit que c’est lui qui a organisé les élections et lorsqu’il est arrivé à Abidjan avec sa troupe il aurait pris la cagnotte, c’est faux. Soro ne peut pas avoir des cagnottes, parce que nos militaires ne pouvaient pas vaincre Gbagbo. Gbagbo était surarmé par rapport à nous. Je ne crois pas à ces gris-gris qu’on porte. Dites à votre armée d’aller annexer la France parce que vous avez des gris-gris. Si la Côte-d’Ivoire fait la même erreur, on l’a détruira en une journée. Les gris-gris encouragent ceux qui vont en guerre, mais ça ne gagne pas une guerre. Tant que les africains n’arrêtent pas de croire à ces vendeurs d’illusion, à ces féticheurs, l’Afrique n’avancera pas. Parce qu’Alassane a gagné légalement, c’est la France qui a déployé les moyens, qui a bombardé le bunker de Gbagbo jusqu’à ce qu’il tombe. Même en 20 ans de combat, les forces nouvelles ne pouvaient pas attraper Gbagbo.

Vous confirmez qu’Alassane a gagné les élections ?
Alassane a gagné haut la main les élections. Alassane était tellement populaire de telle sorte que le second tour a été une chance pour Gbagbo. S’il y avait une élection entre 1995 et 2000, Alassane, Gbagbo et Bédié, Alassane passait avec un score de 70%. Il était tellement populaire. Gbagbo est arrivé au pouvoir sans électeurs. Ce sont les armes de la gendarmerie qui ont porté Gbagbo au pouvoir. Gbagbo a fait un coup d’état civil. Quand il est arrivé au pouvoir, il a acheté les gens, il a pris l’argent pour travailler pour l’achat des consciences et pour aider certaines populations du Sud et de l’Ouest. Nous n’avons pas bénéficié de cela. Lors des élections, il a fait des sondages qui ont dit qu’il allait battre Alassane. C’est comme cela qu’il est allé aux élections, mais malheureusement il n’a pas gagné. Pour le moment Alassane est imbattable en Côte d’Ivoire. Quoi qu’on dise, il est l’homme de la situation. Aujourd’hui, malheureusement il ne travaille pas. Je ne sais pas s’il a été marabouté comme les gens le disent, mais le puissant Alassane de 90, ce n’est plus le même qu’on connait. Il y a des choses qu’il aurait pu faire mais il ne le fait pas. Il n’a pas nommé une équipe brillante alors que lui-même il est brillant. Je donne l’exemple quand je parle. Regardez un gars comme Touré Gaoussou, ancien ministre de transport. Devant un parterre de personnalités à Odiéné, il annonce la visite d’ADO et il dit que le président vous a donné 20 mignions. Il ne peut même pas dire 20 millions. S’il devrait les récompenser, il devrait leur offrir villas et voitures, argent mais pas les nommer ministres ou à des postes de responsabilités. En ce moment, l’administration devient lourde et ne tourne pas. Et c’est malheureux pour l’Afrique. Alassane est bien, mais je l’interpelle à changer d’équipe. Après Alassane, c’est sûr que nous n’accepterons plus des vieux à la tête de nos Etats. Il faudra des jeunes constructeurs.

Après les élections de 2010, IB est mort. Pouvez-vous revenir sur les circonstances de sa mort ?
Moi, je dis que IB s’est suicidé parce que quand il m’a choisi comme spirituel, il y a un militaire qu’on appelle aujourd’hui Jack Bauer. Lui qui était le patron du commando invisible et qui est actuellement au ministère de la défense. Partez lui poser la question. Il était là avec mon cousin qui est mort, IB et moi. Nous étions quatre dans la même pièce le samedi nuit. J’ai demandé à IB sur quoi il comptait pour tenir tête à Soro. Je lui ai dit que j’étais là quand il a fait appel à Soro mais ne regarde plus Soro. A travers lui, il y a l’ensemble des puissances comme la France et l’ONU derrière. C’est vrai que tu as combattu Gbagbo avec tous ses chars mais quand l’ONU et la France rentreront dans la danse, tu ne pourras pas tenir. Je sais que d’ici mercredi toi IB ou Soro va mourir. Je suis spirituel et je l’ai vu. Je lui ai donné les dispositions à prendre. Il a dit à Bauer de voir avec moi. Bauer me dit qu’ils ont besoin de quelques éléments avec eux et en plus ils n’ont pas de liquidités avec eux. Je lui ai dit que le temps est très court. Le mercredi IB a été tué. Soro a formé un collège de huit marabouts qui sont venus dire à IB qu’il devait être le président. IB ne devrait pas croire naïvement à ces gens. Il devrait me consulter en tant que son conseiller spirituel et j’allais lui dire non. Mais à partir du moment où IB voulait organiser les élections pour être président, il ne pouvait plus. C’est vrai, Alassane a aidé Soro à récupérer la rébellion. Mais c’est Soro qui a induit Alassane en erreur. IB devrait être lucide et comprendre tout cela. IB ne m’a pas écouté et il est mort. C’est Soro qui a tué IB et non Alassane. Alassane a donné l’ordre d’aller désarmer IB de force mais il n’a jamais dit de le tuer. Soro voulait en finir avec IB parce qu’il sait que si IB est là, lui Soro ne pouvait jamais être président parce que IB allait le tuer un jour ou c’est lui qui tuait IB. C’était comme Sankara et Blaise. Soro, les ivoiriens ne le connaissent pas. C’est un Hitler en personne. Mettre Soro à la tête d’un état, c’est aller au chaos. La Côte- d’Ivoire ne commettra jamais cette erreur de placer Soro à la tête de son Etat. Le jour que Soro sera candidat pour être président, s’il n’y a pas quelqu’un pour l’affronter, je serai candidat contre Soro. (…)

Entretien réalisé par Wend-Tin Basile SAM du journal l’évenement
sw.basile@yahoo.com

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