La session extraordinaire du pôle ECOFI se poursuit au TGI de Bobo. À l’audience du 24 avril 2025, dix personnes étaient à la barre dont des ingénieurs et agents à la Direction provinciale de l’agriculture du Houet au moment des faits.
Dans le dossier, le Procureur du Faso près le tribunal de grande instance de Bobo-Dioulasso reproche plusieurs infractions aux prévenus. Il s’agit entre autres, des faits de détournement de deniers publics, de concussion, d’enrichissement illicite et d’abus de fonction. En l’espèce, le Parquet poursuit l’ex-directeur provincial d’agriculture du Houet, P. A, aujourd’hui Directeur régional en charge de l’agriculture des Hauts-Bassins, pour avoir perçu des frais de visite de terrain situé hors lotissement dans le cadre de demande d’avis technique adressée au service d’un montant de 33 800 000 F CFA. Alors que ces faits sont punis par le code pénal. Outre cela, le Procureur a estimé que dans les mêmes circonstances, ce dernier s’est enrichi illicitement avec cette somme. En plus de lui, neuf autres de ses collègues ayant servi à la Direction provinciale de l’agriculture du Houet sont également dans le viseur pour les mêmes faits. Aussi, le Parquet reproche à certains d’entre eux d’avoir détourné des fonds appartenant à l’Etat notamment la perception de loyers de la cité d’hébergement à la Direction provinciale de l’agriculture à hauteur de plusieurs millions de FCFA. Selon le Parquet, les faits ont été commis entre 2017 et 2023. C’est suite à un contrôle de l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de lutte contre la corruption dans ledit service que le dossier a vu le jour.
Les débats à l’audience
À la barre, les prévenus interrogés sur les faits, aucun ne les reconnaît. Pour eux, cette pratique existait avant leur arrivée dans le service. « Nous sommes venus trouver la pratique et nous aussi avons continué. Nous ne savons pas que c’était puni par la loi », affirme l’un des prévenus à la barre. Pour mieux comprendre, le juge pose la question à une des prévenus (une dame), en service à la Direction provinciale des ressources animales, de savoir pendant combien de temps, elle a perçu les 25 000 F CFA par dossier ? Elle répond » c’est de 2022 à 2023« . Une autre question est de savoir combien elle a perçu en tout ? » J’ai récolté plus de 17 millions de FCFA et j’ai utilisé pour des dépenses du service « , dit-elle. L’agent judiciaire de l’Etat a posé deux questions à la même dame. La première est celle de savoir quelles sont les attributions de la Direction provinciale de l’agriculture et des ressources animales et halieutiques ? Et la deuxième est de savoir ce qu’elle faisait, rentrait-il dans le cadre de ses attributions ? La prévenue est restée muette face à ces deux questions. Et l’AJE est revenu pour dire aux juges que « c’est ce qui explique le flou dans la perception de ces fonds ».
Le juge a déclaré à tous les prévenus que les difficultés sont réelles dans l’administration mais, est-ce que vous avez fait des écrits adressés à votre supérieur hiérarchique pour exprimer vos besoins ? La réponse est négative, selon les prévenus. « Non, nous ne l’avons pas fait », disent-ils.
Réclamations de l’Etat
En premier lieu, le Réseau national de lutte anti-corruption des Hauts-Bassins s’est constitué partie civile. Il a réclamé la somme de 500 000 FCA au titre des dommages et intérêts. En deuxième lieu, l’Etat représenté par l’agent judiciaire de l’Etat s’est aussi constitué partie civile car il a estimé que l’Etat a subi une perte. L’AJE a réclamé solidairement la somme de 5 millions F CFA à tous les prévenus et plus de 20 millions au titre des sommes perçues pour les loyers de bâtiments à trois des prévenus.
Réquisitions du Procureur
Le Procureur a estimé que les faits de concussion sont caractérisés à l’égard des dix prévenus conformément à l’article 332 du code pénal. Il a requis contre chacun d’eux la peine d’emprisonnement de 12 mois avec sursis et une amende ferme d’un million de F CFA. Les avocats ont estimé que ce procès est pédagogique et que le tribunal doit rendre une décision qui va donner une leçon à leurs clients. Il ne faut pas aller à la condamnation systématique, monsieur le président. « Il faut juste permettre à nos clients de s’amender pour ne plus recommencer les mêmes erreurs « , plaide un avocat de la défense.
Verdict du tribunal
Le tribunal correctionnel a livré son verdict le samedi 26 avril 2025. Il a retenu tous les 10 prévenus coupables des faits de concussion à leurs reprochés. En répression, condamne chacun à 12 mois de prison avec sursis et une amende d’un million de F CFA, ferme. S’agissant des réclamations des parties civiles, le tribunal a reçu la demande du REN-LAC. Cependant, celle de l’Etat burkinabè a été déclarée mal fondée. L’Express du Faso