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Procès du putsch : « je suis victime de mes détracteurs politiques »


Les audiences du procès du putsch se sont poursuivies, le jeudi 4 octobre 2018, avec l’interrogatoire du colonel Abdoul Karim Traoré et du commerçant, Abdoul Karim Baguian dit Lota. Si le premier est poursuivi pour complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat, le second, lui, est accusé de coups et blessures et de dégradations volontaires aggravées de biens.

Le jeudi 4 octobre 2018, le colonel Abdoul Karim Traoré, magistrat-écrivain et analyste politique, a comparu pour le 2e jour consécutif devant le tribunal militaire. A l’audience du jour, les avocats de l’accusé, Me Dieudonné Willi et Me Moussa Sogodogo sont revenus sur les irrégularités qui entacheraient la procédure de poursuite de leur client. Il s’agit des Procès-verbaux (PV) des commissions rogatoires qui ne sont pas signés par le prévenu. Selon Me Willi, l’article 105 du code de procédure pénale stipule que si les PV ne sont pas régulièrement signés, ils sont nuls et non avenus. « S’ils n’ont pas été signés, c’est parce que l’accusé ne se reconnaît pas dans les propos retranscrits. Aussi,  l’ordre de poursuite a été signé le 2 octobre 2015 pendant que le client se faisait interroger à la gendarmerie », a-t-il notifié. « Si tel était le cas, pourquoi le colonel a signé le carnet de déclaration dont le contenu est le même que les PV? », s’est interrogé Me Séraphin Somé, avocat de la partie civile. Qu’à cela ne tienne, a précisé l’avocat, la loi donne plusieurs possibilités pour attaquer des actes irrégulièrement dressés, notamment la saisine de la chambre de contrôle, alors que la défense n’a rien fait. Me Sogodogo est allé plus loin en réclamant la nullité des poursuites contre son client. Car les dispositions spéciales liées à la qualité de magistrat (désignation de la juridiction de jugement d’abord, audition à la gendarmerie ensuite) n’ont pas été respectées. En effet, un arrêt a été rendu par la cour de cassation le 6 novembre 2016 en tenant compte de cette qualité du colonel, mais la procédure n’a pas été respectée. « Alors, tout ce qui a été engagé avant cette date est nul », a souligné l’avocat qui ajoute à ces irrégularités, le rapport d’expertise téléphonique.

« Expertise non notifiée à la défense »

A entendre la défense, cette expertise contient des failles parce que les droits de l’accusé ont été violés, en ce sens qu’il n’a reçu aucune ordonnance d’un expert notifiant les conclusions du rapport. « D’ailleurs, on a été appelé par le juge au bureau. Arrivé, on nous a présenté un document volumineux nous disant qu’il s’agit du rapport téléphonique. On n’a pas eu le temps de le consulter, juste une présentation des pages nous concernant », ont laissé entendre les conseils de l’accusé. Et le ministère public de préciser que le juge a fait mention de présentation du rapport certes, mais il a donné un délai d’une semaine aux avocats de l’accusé pour consulter le rapport et apporter leur notification. Mais ces derniers auraient mentionné qu’ils n’ont pas de notification à faire. « Alors pourquoi rejeter ce rapport aujourd’hui ? », s’est demandé le procureur militaire, Alioun Zanré qui estime que les avocats évoquent la nullité de certains actes de la procédure parce qu’ils se retrouvent dos au mur.  Après cette querelle procédurale, l’interrogatoire de l’accusé s’est poursuivi. Aux dires de celui-ci, il a été impliqué dans ce coup d’Etat parce qu’il a cherché à s’informer sur la situation. « Etant un analyste politique, j’ai tenté d’apporter mon aide pour résoudre la crise. Et si la hiérarchie militaire m’avait écouté, on ne serait pas à ce nombre de morts, de blessés et de dégâts matériels. Il suffisait de contrôler la ville de Ouagadougou par les forces de défense et de sécurité dès le 18 septembre 2015. Ils avaient le devoir d’assurer la sécurité des populations », a-t-il expliqué. Pour ce qui est de son inculpation, M. Traoré a demandé au parquet de démontrer par des faits sa culpabilité et à ses avocats de renchérir qu’il pourrait au contraire être considéré comme un témoin.

« Ce qu’a dit Manli est archi-faux »

A la reprise, les avocats de la partie civile ont encore chargé le magistrat militaire. Pour Me Somé, l’accusé est plutôt un homme politique et non un analyste politique comme il le fait croire. « Malgré le fait qu’il soit un officier supérieur et un magistrat, il n’a pas craint de critiquer, devant la barre, la charte de la Transition. Il a également dit que la gestion de la Transition posait problème », a déploré l’avocat. Son confrère, Me Ali Néya, a soutenu que la présence du colonel Traoré aux côtés du Général Diendéré est un élément positif de preuve qu’il a participé au projet du putsch. Mais les conseils de l’accusé ont demandé au Tribunal militaire de croire à la sincérité de la déposition de leur client qui mentionne qu’il était en quête d’informations pour écrire son ouvrage. L’écrivain a terminé en s’inclinant devant la mémoire des disparus et en souhaitant un prompt rétablissement aux blessés. A la suite du colonel Traoré, c’est Abdoul Karim Baguian dit Lota qui a été appelé à la barre. Commerçant de son état, il est né en 1984, marié religieusement et père de cinq enfants. Poursuivi pour coups et blessures volontaires et dégradation volontaire aggravée de biens, l’accusé a dit reconnaître partiellement les faits. Dans son récit, M. Baguian a avoué avoir asséné des coups à un certain Nicolas Kaboré, le 20 septembre 2015, à l’hôtel Laïco. « Je regrette d’avoir fait partie de ceux qui ont porté des coups à Nicolas Kaboré. Je lui présente mes excuses », s’est-il exprimé. Le commerçant a relaté que le 17 septembre aux environs de 9h, il a reçu un coup de fil de l’ex-maire de l’arrondissement n°12, Awa Bikienga, l’informant d’un rassemblement au rond-point des Martyrs. Croyant qu’il s’agissait d’un regroupement de son parti, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), il s’y est rendu et a trouvé du monde. De là-bas, l’accusé apprend que des jeunes de son parti ont été arrêtés et détenus au domicile de feu Salifou Diallo. « Je suis allé les libérer et non incendier la maison. C’est sur France 24 que j’ai su que le domicile a été incendié », a précisé M. Baguian. « Que savez-vous de l’incendie des domiciles de Safiatou Lopez et de Simon Compaoré ? », a demandé le tribunal militaire. L’accusé a indiqué être étranger à ces faits. Mais le parquet militaire n’est pas du même avis. Pour lui, Yacouba Manli, qui assurait la sécurité du domicile de Salifou Diallo, a dit dans son procès-verbal que c’est Lota qui était le meneur des manifestants. « Les propos de Yacouba Manli sont archi-faux. Ce sont mes détracteurs politiques qui ont tout organisé contre moi, parce que je suis militant du CDP », s’est défendu Lota. Son audition se poursuit ce vendredi à partir de 9h. Source: Sidwaya

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